Par Philippe Ducarroz
Les départs se succèdent et on ne voit rien arriver à l’horizon. Tout au plus chuchote-t-on timidement qu’une offre a été faite à Harri Säteri pour rempiler devant les filets. À Bienne, on devrait quand même se faire des cheveux blancs, même si le boss Daniel Villard se veut rassurant dans le Journal du Jura de ce matin. Nous, on veut bien, mais une petite analyse de la situation s’impose.
Aujourd’hui, le HC Bienne, vice-champion de Suisse et à quelques centimètres d’avoir été sacré, ne vit plus du tout dans le même monde qu’au temps d’Antti Törmänen. Et quoiqu’on en dise, c’est bien la maladie du coach biennois de la saison passée qui est le déclencheur évidemment malheureux de la situation actuelle. Hier, le HC Bienne voguait en eaux calmes avec un coach fait sur mesure et des joueurs pleinement satisfaits de leur sort. Donc performants. Tout avait été assimilé sans douleur, en parfaite harmonie et les Seelandais pouvaient même se targuer d’avoir les ressources humaines nécessaires pour combler une défaillance notoire à l’un ou l’autre poste du contingent.
Aujourd’hui, l’équipe éclate. D’abord parce que Törmänen a été remplacé par un Petri Matikainen au style résolument moins… paternel. La faute au coach? Oui et non. Joueurs et entraîneur(s) doivent savoir travailler en bonne intelligence, en mettant parfois de côté certains principes ou idées pourtant éprouvés. Or, quoiqu’en dise Villard qui répète que le poste de Matikainen n’est pas en danger en ce moment, la maillonnaise ne prend que très difficilement. Et certains éléments de l’équipe, qui avaient de toute façon des envies de changements dans un avenir plus ou moins proches, ont finis d’être convaincus que le moment était arrivé.
Manque d’anticipation
On adore Martin Steinegger. Son boulot au fil des années a été plus que payant. Il est à la base du grand HC Bienne que nous avons croisé l’an passé. Mais un grand directeur sportif doit toujours avoir un temps d’avance. Aujourd’hui, Steinegger doit concéder qu’il n’avait sans doute pas suffisamment assuré ses arrières. L’effet Törmänen, encore une fois, ou quand rien de bien méchant ne semble devoir vous contrarier. Or, ce sont bien dix-sept contrats qui arrivaient à échéance au terme de la saison et Stoney a sans doute pensé qu’il pourrait les renouveler en grande partie. Dix-sept!
Résultat, Joren van Pottelberghe, Mike Künzle, Yannick Rathgeb et Tino Kessler en tout cas vont changer d’employeur. Arrivés à Bienne sans carte de visite, ils repartent avec un sacré bagage. Du coup, Steinegger n’a plus les moyens de les retenir. Luca Hischier pourrait aussi succomber à d’autres propositions, ce qui serait bien sûr catastrophique pour le EHCB. Il y a aussi les jours-cadres qui n’ont pas la certitude de voir leur contrat renouvelé, même s’ils peuvent se dire que leur club n’aura pas le choix, le marché étant quasiment sec. On pense particulièrement à Damien Brunner, Fabio Hofer et le capitaine Beat Forster. Par contre, un non-renouvellement de ces gros contrats permettrait de répartir un peu mieux sur plusieurs éléments prometteurs à développer.
Moins grave pour les étrangers
Ce manque d’anticipation sera moins grave à résoudre avec les étrangers, car le marché est beaucoup plus vaste. Ils sont huit à ne pas connaître leur avenir. Seul le Russe Aleksandr Yakovenko est certain de jouer douze mois supplémentaires à la Tissot Arena. Pour les autres, les tendances sont diverses. On peut imaginer Harri Säteri dans la cage, Jere Sallinen, Toni Rajala et Jesper Oloffson (soit les trois meilleurs compteurs de l’équipe) demeurer à Bienne. Viktor Lööv, en pleine forme physique, est aussi un élément vital pour son coach. Après sa blessure, on ne voit pas Bienne ne pas le renouveler. L’impression fournie depuis son arrivée par Rihards Bukards est positive, mais jugeons encore le bonhomme jusqu’au terme de son entente actuelle portant jusqu’en janvier. Reste l’attaquant Aleksi Heponiemi, deux matchs de CHL et une passe au compteur. Le reste du temps blessé. Difficile de miser aujourd’hui sur lui.
Toujours est-il que cela nous donnerait déjà sept étrangers pour 2024/25, La question principale est de savoir si le trio Sallinen-Rajala-Olofsson est prêt à continuer à travailler avec son compatriote nordique. À notre sens, le cas Ville Pokka, lui, est réglé. Il quittera Bienne rapidement. Steinegger estime qu’entre 30 et 50% des joueurs de l’équipe actuelle quitteront l’équipe. On sera sans doute plus près de la moitié…
Bienne devra passer par la case jeunesse. C’est dire qu’il ne faudra pas se montrer gourmand pendant au minimum deux ou trois saisons avant de revoir les Seelandais viser les avants-postes. Les propos de Villard et Steinegger vont dans ce sens. Des gars s’illustrant actuellement chez les U20 auront sans doute bientôt leur chance, des noms pas encore très familiers comme Guillaume Kaser, Paul Mottard, Jamie Villard ou Nico Steinegger. La question est maintenant de savoir par quels « grands frères » ils seront entourés…