Par Christoph Yavkin
À l’aube de la saison 2018/19 de la LNA (pas encore re-nommée National League), mon éminent collègue Klaus Zaugg, une authentique sommité de la matière, relevait que le Langnau d’Heinz Ehlers alors, disposait de la meilleure équipe depuis les retrouvailles avec la plus haute division, après ses deux dernières années malheureuses de purgatoire. Il avait raison et les Tigres allaient le confirmer avec une qualification directe pour les playoffs, au cours desquels, contre toute attente, ils contraignaient même le LHC à un 7ème match couperet en quart de finale. Le Langnau de cette saison-là était porté par un duo Harri Pesonen–Chris DiDomenico, avec un (encore très bon, avant de disparaître) Eero Elo en sniper et un très dévoué Aaron Gagnon.
Six saisons plus loin, les SCL Tigers ont toutefois et maintenant dépassé la marque de 2018 et franchi un palier très important pour leur avenir au plus haut niveau. Dans l’histoire, on ne trouve une si solide structure qu’à trois reprises auparavant. Outre celle évoquée plus haut, laquelle induit la situation d’aujourd’hui, il y a celle de l’année du seul titre, 1976, à 83, avec Jean Cusson, Normand Beaudin et le professeur suédois Arne Strömberg, ainsi que le duo canadien Peter Sullivan/Neil Nicholson, puis celui de la période 1995-98 et le retour en LNA d’alors.
Sous le leadership exemplaire de l’infatigable Pesonen, l’arrivée d’Aleksi Saarela, suivie de celle de Vili Saarijärvi, tous les deux de Lukko Rauma, ont bonifié l’ensemble: leur très proche amitié n’est surtout pas à négliger dans le contexte. L’apport de Juuso Riikola en 2023, l’a encore optimisé. Le petit gars de Joensuu, dans la très lointaine Carélie, encore assez modeste en 78 matches de NHL avec Pittsburgh, est un joyau défensif. Enfin, arrivé en duo pack avec son très vite décevant compatriote Anthony Louis, et à l’image d’un Simon Ryfors (Davos) dans un rôle sensiblement identique, Sean Malone est sans aucun doute l’étranger le plus sous-évalué de notre championnat et a continuellement snobé les incrédules.
Habitué des 65 à 75% des engagements gagnants, sauf rares exceptions, et surtout très sobre, il est un autre élément stabilisateur de l’ensemble. Il faut mettre ici en évidence et en lumière, que qunze face-offs remportés, c’est l’équivalent de 300 secondes au bas mot, de possession, autrement dit de 5 à 7 minutes où l’équipe n’est pas en danger, n’est pas exposée à recevoir un but, près d’un 12% du temps d’une rencontre. Au milieu de toutes les statistiques les plus fantaisistes parfois, celle-ci n’est jamais véritablement mise en évidence. Et puis, bien sûr, comme en son temps celle de Benjamin Conz, prêté par Chris McSorley à Langnau avant d’être dirigé impitoyablement vers Lugano, l’explosion des capacités de Stéphane Charlin, également de Genève (!) a encore contribué à transcender le collectif.
Affirmation des seconds couteaux
La confiance a bondi de manière linéaire à ce contexte. Au plan des joueurs suisses le transfert retour de Julian Schmutz, un ADN collant à celui du groupe, celui du laissé pour compte à Zoug Dario Allenspach, ainsi que l’affirmation de seconds couteaux de la valeur du 2ème Schmutz, Flavio (notamment également excellent aux engagements), Dario Rohrbach, puis encore Joël Salzgeber et de plus en plus, un Patrick Petrini qui affirme son potentiel, l’équipe est devenue très mature. En réalisant et cultivant cette chimie avec le plus grand soin, Thierry Paterlini a permis que les Emmentalois deviennent toujours plus redoutables.
Il existe encore trois indices qui en sont les reflets: de la plus perméable des défenses de ligue nationale il y a encore deux ou trois ans, Langnau est devenu dans un même temps aussi bref l’une des meilleures! D’autre part, il faut relever les présences de Steve Hirschi au côté de Paterlini, de Jürg Reber au coaching des U20, de Samuel Balmer à celui des U18, de Martin Gerber ou encore Bruno Brechbühl plus loin: jusqu’aux U13, la colonne est une pyramide locale d’une très grande cohérence. Enfin, l’achèvement de l’infrastructure autour de l’ancienne Ilfis, ainsi que je m’autorisais à l’affirmer avant le début de la saison en cours, a encore maximisé l’effet, à la façon d’un petit bâton d’explosif.