Cher Monsieur Ambühl, Cher Andres,
Tout d’abord, permettez-moi de vous féliciter pour la magnifique victoire acquise hier contre la Tchéquie, vous souhaite un bon mardi de repos et surtout une fin heureuse à l’occasion de ce championnat du monde.
Je me permets ces quelques mots afin de réparer ce que je considère désormais comme une injustice et je tiens à reformuler des propos sévères que j’ai eu à votre encontre depuis plusieurs mois. Car oui, je l’avoue, j’ai eu beaucoup de mal à comprendre pourquoi votre coach Patrick Fischer s’évertuait à vous convoquer en équipe nationale en plein «rajeunissement» alors que votre premier mondial senior date de la saison 2003/04 et que vos coéquipiers s’appelaient alors Julien Vauclair, Luca Cereda, Martin Steinegger, Marcel Jenni et… Patrick Fischer. Qui ont tous déjà endossé, et depuis pas mal de temps, le costard d’entraîneur…
Vous, dix-huit championnats du monde plus tard, à 41 ans cher Andres, vous êtes toujours joueur! Et je faisais partie de ceux qui, avec toutefois beaucoup de respect pour votre carrière (six titre nationaux, une médaille d’argent en championnat du monde) ne voyaient plus vraiment ce que vous pouviez apporter de plus que cette horde de jeunes attaquants affamés qui frappent depuis un moment aux portes de l’équipe nationale. Je faisais même partie de ceux qui attendaient sans doute très injustement – et secrètement – l’arrivée d’un huitième élément de NHL (Pius Suter) pour que Fischer vous mette abruptement sur la liste des surnuméraires. Et ainsi justifier mon propos assez direct.
J’ai lu, il y a quelques semaines, un édito demandant que les «patins du déambulateur de Ambühl soient suffisamment affûtés». Propos injustifiables par rapport à un homme qui, cette saison, affiche 24 points en 59 matchs avec Davos et aujourd’hui quatre passes décisives en trois rencontres à Prague. Comme quoi, même en étant plus lent et inconstant, on peut encore peser sur une partie.
Vous êtes donc venu me le rappeler, vous qui êtes un couteau suisse de première qualité: non seulement vous êtes prêt à jouer à l’aile (votre poste de prédilection) qu’au centre, mais vous acceptez aussi sans broncher les décisions tactiques de votre coach. Comme par exemple votre remplacement par Kevin Fiala sur les situations spéciales depuis son arrivée. Car pour vous, je l’ai compris maintenant, l’essentiel n’est pas (plus?) là. Vous, le recordman de sélections, qui êtes devenu un visage reconnu dans toutes les patinoires européennes, vous bénéficiez d’une aura unique. Vous voulez en faire profiter les autres. Ne vous manque finalement que la parole facile pour devenir coach… avant l’heure.
Car oui, si je pouvais encore considérer votre rôle porteur dans le vestiaire (car quand vous parlez… si peu, vous parlez bien!), je suis obligé d’admettre que votre place se justifie dans ce groupe pourtant haut de gamme. Et des quatorze attaquants convoqués par Fischer, vous n’êtes pas le plus mauvais.
Cher Andres, je vous demande désormais de pardonner mon empressement à vous mettre à la retraite internationale. Votre expérience est un atout dont l’équipe de Suisse aujourd’hui ne peut pas se passer. Vous êtes l’exemple-même du coéquipier-modèle à défaut d’être encore un leader. Quoique… Avec votre état d’esprit et votre passion pour le hockey, c’est peut-être vous qui montrerez encore la voie pour accéder au podium. Ou pas. Mais je vous tire désormais d’ores et déjà mon chapeau!
Avec tout mon respect.
Philippe Ducarroz
P.S. À mes collègues Laurent Perroton et Christian Ponti du «Premier Boc»: inutile de m’attribuer un Casque d’Or pour ce mea-culpa lors de notre prochaine édition. Ce serait trop facile, même si ça pique.
