Jouer à domicile est-il un gage de succès au Championnat du monde de hockey sur glace? Ces dernières éditions semblent le suggérer. De 2022 à 2024, les pays hôtes ont brillé. Mais cette tendance récente reflète-t-elle une réalité plus profonde ou s’agit-il d’une série d’exceptions heureuses? En 2022, la Finlande, coorganisatrice avec Helsinki et Tampere, réalise un doublé historique: médaille d’or olympique suivie du sacre mondial, une performance inédite depuis la Suède en 2006. En finale, Sakari Manninen libère tout un peuple en marquant le but décisif en prolongation contre le Canada (4-3).
En 2023, la Lettonie entre dans l’histoire. À défaut d’avoir disputé son match pour le bronze à Riga — la phase finale ayant eu lieu en Finlande — la victoire 4-3 contre les États-Unis en prolongation déclenche une vague de célébrations. Une première médaille mondiale et un jour férié en guise de récompense. L’an passé, la Tchéquie s’offre l’or chez elle, une première depuis la dissolution de la Tchécoslovaquie, grâce à un but tardif de David Pastrnak face à la Suisse.
Cette année, la Suède semble bien placée pour poursuivre cette série. Invaincus en phase de groupes… sauf contre le Canada, les Tre Kronor rêvent d’un titre à Stockholm, douze ans après leur sacre à domicile en 2013. Le Danemark, coorganisateur, vit une aventure différente. Balayés lors des trois premiers matchs (17 buts encaissés face aux États-Unis, à la Suisse et à la Tchéquie), les Danois ont ensuite réagi, engrangeant neuf points. «Le début a été frustrant, les trois premiers adversaires étaient redoutables. On gardait un mince espoir, et on s’y est accrochés», reconnaît l’attaquant Christian Wesje. Quant à Patrick Russell, il admet l’importance de la ferveur populaire: «On savait que ce dernier match (réd.: contre l’Allemagne) pouvait tout changer. On est prêts, les supporters sont derrière nous.»
le revers du «facteur domicile»
Malgré ces récents succès, le passé regorge de désillusions pour les pays hôtes. En 2000, la Russie, ultra favorite à Saint-Pétersbourg, échoue à la 11e place. Trois ans plus tard, la Finlande, en tête 5-1 contre la Suède à Helsinki, s’effondre en quart (6-5). En 2004, la République tchèque tombe face aux États-Unis sur un tir de fusillade signé Andy Roach. Les nations moins cotées subissent également. En 2005, l’Autriche est reléguée à domicile après un seul point glané. En 2018, le Danemark espérait atteindre les quarts, mais chute 1-0 face à la Lettonie dans un match couperet.
Les nations investissant dans le développement du hockey voient leurs objectifs évoluer. La Suisse, trois fois finaliste (2013, 2018, 2024), jouera gros chez elle en 2026 (Zurich et Fribourg). L’Allemagne, après sa médaille d’argent en 2023 et son parcours héroïque aux JO 2018, ne se contentera pas de simples quarts lorsqu’elle accueillera le tournoi en 2027 (Düsseldorf et Mannheim). Dans ce contexte, les critères de succès varient. Pour les membres du « Big Six » (Canada, États-Unis, Suède, Finlande, Tchéquie, Russie), seule l’or semble satisfaire. Pour les autres, une qualification en quart reste un objectif réaliste.
Quelles que soient les performances de cette édition, le Danemark peut se targuer d’une stabilité enviable. Présent dans l’élite mondiale depuis 2003 sans interruption, il s’affirme comme un exemple de constance. Un parcours qui mérite d’être salué, quel que soit le résultat à Herning. Car s’il est difficile de prédire le destin d’un pays hôte, il est certain que la passion du hockey, elle, est toujours au rendez-vous. Surtout face au Canada dans un quart de finale à priori très déséqulibré mais pourrait alors déboucher – pourquoi pas? – sur une des plus grosses sensations de l’Histoire du hockey d’après-guerre.
